L’année 2024 fut une année inédite pour le secteur canadien de l’éducation internationale. Les changements apportés au Programme des étudiants étrangers (PEE) du Canada depuis l’automne 2023 ont déjà causé d’importantes répercussions sur les inscriptions des étudiant.e.s internationaux.ales dans nos établissements. C’est particulièrement vrai pour le plafond d’inscriptions d’étudiant.e.s internationaux.ales annoncé en janvier 2024.
Le BCEI est sensible au contexte politique canadien axé sur la réduction du nombre de résident.e.s temporaires. Toutefois, les plus récents changements au PEE annoncés par le ministre Miller le 18 septembre 2024 infligent un autre coup dur à notre secteur. La réduction du plafond, en plus des restrictions apportées au Programme de permis de travail postdiplôme (PTPD), aura pour effet d’exacerber la situation pour nos établissements et nos communautés. Ces restrictions auront, et ont déjà, des conséquences sur la perception internationale du Canada comme destination d’études. Qui plus est, les récentes mesures annoncées le 18 septembre nuiront davantage à notre capacité à recruter les meilleurs talents internationaux. En effet, elles envoient le message aux étudiant.e.s internationaux.ales intéressé.e.s que le Canada est en train de leur fermer ses portes.
Le BCEI remercie Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) d’avoir tenu compte de nos commentaires au sujet de l’obligation morale de maintenir la possibilité pour les étudiant.e.s internationaux.ales actuel.le.s d’obtenir un PTPD et la résidence permanente, possibilité qui leur avait été offerte au moment de demander leur permis d’études. Nous avons également bien accueilli la transparence du ministre concernant les futures réductions dans l’octroi de PTPD qui seront associées à chaque changement de politique.
Bien que le BCEI soit déçu des diminutions annoncées de l’allocation des permis d’études pour 2025 et 2026, nous sommes soulagé.e.s que ces baisses ne soient pas plus importantes et que les établissements pourront jouir d’une certaine prévisibilité en ce qui concerne le plafond d’inscription au cours des deux prochaines années. Cette prévisibilité offre aux établissements une mesure de stabilité nécessaire à leur planification. Nous nous réjouissons également de l’exception accordée aux secteurs primaire et secondaire, qui ne sont pas inclus dans le plafond. Enfin, le BCEI considère comme un développement positif le fait qu’à compter du mois de janvier 2025, les étudiant.e.s en visite ou en échange qui séjournent plus de 6 mois au Canada seront exempté.e.s du plafond. Cette mesure permettra de s’assurer que les étudiant.e.s canadien.ne.s pourront continuer d’étudier à l’étranger dans le cadre de programmes d’échange réciproque.
Par principe, le BCEI encourage une harmonisation entre l’octroi de PTPD et les besoins du marché du travail canadien. Cette harmonisation permet de mieux gérer les attentes des étudiant.e.s internationaux.ales et de clarifier que ce ne sont pas toutes les personnes qui souhaitent rester au Canada après leurs études qui pourront le faire. Toutefois, comme nous avons expliqué durant nos discussions avec le ministère cet été, nous croyons fermement que les besoins du marché du travail doivent être déterminés par les régions et les provinces. Elles sont les mieux placées pour connaître les besoins à l’échelle locale et pour orienter les initiatives adéquates de recrutement et de formation. Nous craignons que l’utilisation d’une approche fédérale fondée sur les codes CNP-CPE ne permette pas de répondre aux réels besoins de main-d’œuvre dans les communautés partout au pays.
En maintenant l’admissibilité au PTPD des étudiant.e.s universitaires au baccalauréat, à la maîtrise et au doctorat, IRCC souligne l’importance de préserver une certaine flexibilité dans les mesures ciblant les programmes et besoins de main-d’œuvre. Le parcours menant des études au marché du travail ne se fait pas toujours à une ligne droite. Des études, quel que soit le domaine, peuvent se traduire par des travaux de recherche, de l’innovation et des initiatives entrepreneuriales qui bénéficient au Canada. IRCC reconnaît clairement les résultats économiques positifs des étudiant.e.s universitaires internationaux.ales.
Cela dit, le BCEI déplore que le ministère n’applique pas la même philosophie aux collèges, puisque l’admissibilité des étudiant.e.s internationaux.ales collégiaux.ales est limitée à des catégories de main-d’œuvre étroitement définies. Bien qu’il ne s’agisse probablement pas d’une conséquence intentionnelle, cette décision donne l’impression que le gouvernement fédéral dévalorise les collèges. Cette impression aura des répercussions sur le plan international, car elle gênera la capacité des collèges à recruter des étudiant.e.s internationaux.ales dans des programmes ayant une grande pertinence pour le marché du travail canadien.
Plus généralement, les nouvelles mesures auront une incidence profonde sur le système d’éducation postsecondaire canadien, déjà fragilisé, et les dommages causés sont d’ores et déjà vivement ressentis tant par les collèges que par les universités. Cette crise réelle et importante du secteur canadien de l’éducation internationale a mis en lumière le sous-financement et la dévalorisation chroniques de l’éducation postsecondaire au pays. Ce dont nous avons vraiment besoin, c’est un engagement des provinces et territoires à financer adéquatement l’éducation postsecondaire au Canada afin de garantir une offre de qualité pour les étudiant.e.s canadien.ne.s. Nos établissements ne devraient pas avoir à dépendre des revenus provenant des droits de scolarité payés par les étudiant.e.s internationaux.ales pour assurer leur survie opérationnelle.
Dans ses discussions avec IRCC, le BCEI a insisté sur le fait qu’aucune autre coupe dans l’éducation internationale du Canada n’était nécessaire, puisque les résultats escomptés étaient déjà atteints. Nous implorons IRCC de s’engager à n’apporter aucun autre changement aux politiques en place. Le secteur canadien de l’éducation internationale et son image de marque ont besoin de temps pour récupérer, se reconstruire et solidifier la capacité permanente du Canada à recruter les talents internationaux de qualité dont notre pays a désespérément besoin pour être à la hauteur de notre réalité démographique et de la situation sur notre marché du travail.
Nous avons beaucoup de pain sur la planche pour permettre à notre secteur de récupérer et de se reconstruire à la suite des récents changements. L’expérience d’autres pays concurrents nous montre que ce processus ne se fera pas du jour au lendemain. En effet, notre secteur aura besoin de cinq à sept ans pour s’en remettre, SI les politiques le lui permettent.
Ces changements nous offrent aussi l’occasion d’entamer une reconstruction intentionnelle, responsable, éthique et durable afin d’assurer la viabilité du secteur de l’éducation internationale du Canada. Le moment est venu pour miser sur l’ensemble de nos leviers d’internationalisation au bénéfice du Canada, au-delà du recrutement d’étudiant.e.s internationaux.ales. C’est avec optimisme que le BCEI travaillera avec les parties intéressées, autant dans le secteur de l’éducation internationale canadien qu’au-delà, afin de préserver l’intégrité du PEE et de l’image de marque du Canada comme l’une des principales destinations pour les talents internationaux. Nous devons faire en sorte que le Canada se trouve en bonne position pour attirer ce talent mondial dans toute sa diversité. Nous en avons besoin pour atteindre nos objectifs d’engagement mondial et pour permettre à notre économie et à notre société de s’épanouir.
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